Christian TYBRING-GJEDDE (Norvège)
18 novembre 2020
La communauté mondiale subit aujourd'hui la plus grave pandémie depuis la grippe espagnole de 1918-1919. Les pandémies ne sont pourtant pas aussi rares qu'on le croit. En un peu plus d’un siècle, en effet, le monde en a connu au moins quatre à l’échelle planétaire, causées par des mutations génétiques du virus de la grippe. Les nouveaux virus ainsi apparus ont submergé les défenses naturelles de l'être humain en 1918, 1957, 1968 et 2009. La maladie a cependant eu des effets variables en termes de mortalité. La grippe dite porcine de 2009, par exemple, a engendré un impact limité sur la santé, contrairement à la grippe de 1918, mais elle s'est propagée largement et rapidement en raison d'une forte intégration mondiale et de la densité des itinéraires de voyage autour de la planète (Verikios et al., 2011).
Il est trop tôt pour prédire le tribut que les sociétés occidentales et le monde vont payer à la pandémie de Covid-19, mais si l'on en croit les premières indications, le coût économique sera lourd, et il faudra sans doute plusieurs années pour s'en remettre. Le plus inquiétant, c'est que le virus pathogène a rendu très difficiles les interactions humaines normales, contraignant des millions de gens à rester chez eux et à ne s'aventurer dehors que pour des motifs impérieux. Le confinement a brutalement mis à l'arrêt des pans entiers de l'activité humaine et économique. Sur le plan économique, les conséquences mondiales sont considérables et pourraient même devenir désastreuses faute d'être bien gérées.
Chargés de mettre au point la manière de gérer la crise et ses néfastes répercussions, les parlementaires et les décideurs politiques doivent absolument saisir l'aspect économique de la pandémie. Ces dernières années, diverses publications économiques ont tenté de modéliser les effets macroéconomiques et microéconomiques des pandémies. Dans le cadre de ce rapport, l'intention n'est ni de construire un modèle, ni d'analyser en détail cette littérature, aussi importante et instructive qu'elle soit. Il s’agit plutôt de mettre en lumière les forces économiques à l'œuvre et leurs effets potentiels sur les calculs que les États vont vraisemblablement devoir effectuer pour atténuer l'impact immédiat de la pandémie. Nous y chercherons également à déterminer comment les sociétés peuvent faire face de la meilleure façon possible aux coûts de long terme, tout en se protégeant de futures pandémies potentielles avec plus d'efficacité que par le passé.
En tout état de cause, le coronavirus actuel a au moins permis de réveiller la communauté internationale, désormais consciente que la vigilance et la préparation sont indispensables. Le coût sera phénoménal, mais celui de l'inaction ou de l'impréparation le sera bien plus encore, comme nous le constatons malheureusement aujourd’hui. [...]