AP-OTAN : L’importance d’une industrie de la défense plus forte pour la force de dissuasion de l’Alliance et la résistance ukrainienne

20 mai 2023

Ce samedi, les législateurs des pays de l’OTAN ont lancé un appel retentissant à leurs gouvernements, les exhortant à accroître leur soutien militaire à l’Ukraine. Ils ont rappelé qu’il était également urgent de pallier les lacunes en termes de production de défense qui pourraient compromettre la solidité de la posture de défense et de dissuasion de l’Alliance.

« L’avenir de l’Ukraine est actuellement forgé dans le creuset de la guerre : nous devons aider cette jeune démocratie, non seulement à gagner cette guerre, mais aussi à instaurer la paix qui lui permettra de devenir une démocratie forte et résiliente parmi ses alliés au sein de l’OTAN », a déclaré Rick Larsen, membre du Congrès des États-Unis, devant les membres de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN réunis à l’occasion de la session de printemps qui se tient actuellement à Luxembourg.

Dans un avant-projet de rapport sans complaisance, M. Larsen exhorte les gouvernements de l’OTAN à accroître leur soutien militaire et politique à l’Ukraine en fournissant, entre autres, des systèmes de défense aérienne, de l’artillerie, des munitions et des véhicules blindés. Les Alliés doivent renforcer leurs sanctions contre la Russie et soutenir l’objectif d’intégration euro-atlantique de l’Ukraine. M. Larsen accueille favorablement la décision du président des États-Unis, Joe Biden, d’autoriser la formation de pilotes ukrainiens sur des chasseurs F-16.

Il remarque toutefois que les Alliés ont aussi épuisé leurs stocks d’armements du fait des transferts à l’Ukraine, mettant ainsi au jour une « vulnérabilité stratégique » interne à l’Alliance.

Ce danger fait l’objet d’un avant-projet de rapport détaillé du législateur turc Utku Cakirozer sur l’importance, face aux menaces russes et à la diversité croissante des défis de sécurité émergents, de maintenir une base industrielle de défense alliée à la mesure du nouveau modèle de dissuasion et de défense de l’OTAN.

« Les Alliés, conscients des retombées qu’aurait une victoire de la Russie, ont dépêché un soutien militaire à l’Ukraine pour que cette dernière puisse défendre sa souveraineté et son intégrité territoriale », écrit M. Cakirozer. « Mais ces efforts, en entraînant l’apparition de pénuries frappant les systèmes critiques et leurs composants, ont mis au jour la fragilité inhérente des bases industrielles de défense des membres de l’OTAN. »

Pour corriger ces vulnérabilités, M. Cakirozer préconise de relever les dépenses de défense en mettant l’accent sur la modernisation et l’accélération de la production ; d’intensifier l’approvisionnement en munitions dans toute l’Alliance ; de s’appuyer davantage sur des contrats pluriannuels de manière à apporter plus de sécurité aux fournisseurs du secteur privé ; et de renforcer la coopération entre les Alliés en matière de production et d’approvisionnement en armements.

C’est précisément sur ce point qu’a insisté Stacy A. Cummings, directrice générale de l’agence OTAN de soutien et d’acquisition : « Nous devons absolument améliorer nos capacités militaires par la modernisation, l’innovation et la coordination d’un approvisionnement multinational, ainsi que par un support logistique collectif », a t elle expliqué aux législateurs.

Depuis le début de la guerre brutale et illégale de la Russie contre l’Ukraine, l’importance de protéger les infrastructures maritimes ne fait plus aucun doute, comme en témoignent les opérations de sabotage menées sur des pipelines en mer Baltique.

« Ces incidents ont tiré la sonnette d’alarme », a remarqué le député islandais Njall Trausti Fridbertsson. « La prise de conscience récente et grandissante des vulnérabilités des infrastructures doit absolument entraîner des mesures concrètes pour protéger les Alliés, ainsi que les équipements et les réseaux dont dépendent leurs citoyens, leurs armées et leurs responsables politiques dans le domaine maritime. »

Au cours d’un autre échange, les législateurs se sont penchés sur l’importance de coordonner l’engagement des Alliés concernant la reconstruction de l’Ukraine. Il sera nécessaire, à cet égard, d’apporter un soutien aux investisseurs privés, de partager les coûts et d’empêcher que le fardeau de la dette ukrainienne ne s’alourdisse.

« La reconstruction de l’Ukraine ne concerne pas seulement l’avenir de l’Ukraine. La paix et la sécurité en Europe ne sauraient être garanties tant que l’Ukraine démocratique n’a pas récupéré son territoire et n’est pas membre à part entière des institutions de sécurité et économiques euro-atlantiques », a déclaré le député polonais Michal Szczerba. « Une Ukraine viable sur le plan économique sera aussi un moteur de croissance pour l’Europe […] il s’agit d’une économie de grande taille et de grande importance, et son décollage aura de nombreuses répercussions positives. »

M. Szczerba a suggéré d’intégrer rapidement l’Ukraine au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) afin de renforcer les réformes économiques et de préparer le pays à une plus grande intégration aux systèmes économiques mondiaux et européens.

Invité à s’exprimer devant la commission de défense et de sécurité, Carlo Masala, co-directeur du Centre pour les études de renseignement et de sécurité de l’université Bundeswehr de Munich, a déclaré que la sécurité européenne finira par avoir besoin de l’intégration de l’Ukraine à l’OTAN. « Il n’y a pas d’autre solution », a-t-il ajouté. « L’Ukraine doit devenir membre de l’OTAN. »