Covid-19 : Kerstin-Oudekki Loone analyse l’approche commune de la logistique internationale et le rôle des parlementaires dans la préparation de réponses stratégiques aux crises à venir
14 juillet 2020
Kerstin-Oudekki Loone, cheffe de la délégation estonienne auprès de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, nous fait part de son point de vue sur le rôle des parlementaires dans la définition de l’avenir des relations internationales et des questions de défense, sur la nécessité d’un partenariat civilo-militaire et sur les liens entre les secteurs de la médecine et de la défense.
4 questions posées à Kerstin-Oudekki Loone:
I. Les efforts déployés par les Alliés pour fournir des ressources et une aide humanitaire aux pays les plus durement touchés ont été essentiels pour aider les Alliés et les partenaires à faire face à cette crise sans précédent. Pourriez-vous nous dire comment l’Estonie a utilisé les structures de l’OTAN pour aider les autres et comment l’Estonie a bénéficié de l’aide d’autres Alliés pendant la crise ?
L’Estonie a soutenu, par l’intermédiaire de la Croix-Rouge internationale, ses alliés de l’OTAN, l’Italie et l’Espagne, à hauteur de 100 000 euros chacun, ainsi que grâce à la livraison de 30 000 masques et de 2 000 unités de désinfectant produites par la société estonienne Nordic Group. Nous avons également livré dernièrement des fournitures médicales à la Géorgie, au Monténégro, à la République de Macédoine du Nord et à l’Ukraine, dans le cadre du mécanisme européen de protection civile et en étroite consultation avec le Centre euro-atlantique de coordination des réactions en cas de catastrophe, un des nombreux efforts déployés par les Alliés pour répondre à la crise.
Nous avons eu la chance de ne pas avoir besoin de l’aide directe de l’OTAN pendant crise de la Covid-19, mais nous avons bien noté que la mission Baltic Air Policing de l’OTAN en Estonie s’était poursuivie pendant la pandémie, y compris avec la rotation de l’armée de l’air française en mai. Il est important de souligner que l’OTAN a continué à fonctionner normalement pendant la crise de la Covid-19, nonobstant les restrictions de voyage en vigueur.
II. Quelles mesures supplémentaires l’OTAN et les forces armées alliées devraient-elles prendre pour accompagner la réponse nationale et internationale à la crise de la Covid-19 ?
L’OTAN est une plate-forme précieuse pour organiser l’approche commune de la logistique internationale, en particulier dans sa dimension militaire. Cette crise a démontré la nécessité d’un meilleur partenariat civilo-militaire, par exemple en matière de logistique (transport aérien, hélicoptères, transport routier, centres logistiques et planification) ou de savoir-faire dans le domaine de la protection contre les risques biologiques (comment et quand utiliser des masques, des désinfectants, des combinaisons de protection, etc.).
Les secteurs de la médecine et de la défense sont inévitablement liés : disposer d’un système national de santé fonctionnel, universel et gratuit, couvrant l’ensemble du territoire d’une nation, s’est avéré être un atout de sécurité essentiel durant cette crise. Pour ce faire, il faut disposer d’hôpitaux dans les zones périphériques ou moins habitées, d’un système de réhabilitation efficace, d’importantes réserves stratégiques de matériel médical et de protections individuelles, tant pour le secteur public que pour le secteur privé. Plus généralement, chaque État, quelle que soit sa taille, a le devoir de veiller à protéger et préserver ses capacités industrielles et scientifiques dans le domaine pharmaceutique. N’oublions pas qu’une fois la crise passée, l’austérité et la rhétorique anti-publique reviendront en force : plus nous serons prospères et en bonne santé et plus nous serons en sécurité, chaque centime investi dans les soins de santé représentant un investissement dans notre sécurité.
III. L’Alliance est confrontée à une crise sanitaire aiguë, mais les autres défis et menaces n’ont pas disparu pour autant. Certains acteurs pourraient d’ailleurs instrumentaliser cette crise à leurs propres fins. À quoi les Alliés et l’OTAN doivent-ils veiller, et comment pouvons-nous nous assurer que l’Alliance reste prête à réagir ?
Cette crise a frappé tous les pays du monde, je ne vois donc pas comment des acteurs étatiques pourraient l’exploiter. À l’inverse, nous avons constaté la nécessité et l’importance d’une véritable coopération internationale : lorsque l’humanité est menacée partout, la solidarité dépasse largement nos divergences politiques ordinaires. Avec cette crise, les États sont devenus des acteurs clés dans les affaires mondiales ; ils étaient les premiers à offrir la solidarité et à coordonner les réponses aux crises. Cette action commune ne doit pas être oubliée à l’avenir, mais doit au contraire servir d’exemple pour construire un monde plus pacifique où les différends seront réglés autour d’une table et où la protection des vies humaines sera la priorité.
Il existe pourtant des acteurs non étatiques qui pourraient être tentés d’exploiter la situation tant au niveau national qu’au niveau de la politique internationale alors que les États sont occupés à gérer la pandémie. Certains de ces acteurs sont déjà à l’œuvre (par exemple en Syrie et au Nigeria) – ce qui nous rappelle que les forces antiterroristes doivent rester en alerte et que leur coopération doit être renforcée.
IV. Quel est le rôle des parlementaires dans cette crise ? Et quel rôle la diplomatie interparlementaire, y compris au sein de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, peut-elle jouer pour atténuer cette crise et préparer la prochaine crise ?
Les parlementaires ont un rôle très important à jouer dans l’élaboration de réponses stratégiques pour préparer les prochaines crises et s’assurer que nous n’oublierons pas les enseignements tirés de ces crises. Nous faisons entendre la voix et la volonté de nos électeurs, mais notre travail et nos discussions définissent également l’avenir des relations internationales et des questions de défense. L’Assemblée parlementaire de l’OTAN est l’un des forums qui permettent de promouvoir les meilleures pratiques et donc d’apprendre les uns des autres, de manière démocratique et participative. Il est absolument essentiel d’élaborer un rapport spécial sur la réponse de nos États membres au coronavirus, en insistant sur la coopération civilo-militaire.
Kerstin-Oudekki Loone, cheffe de la délégation estonienne auprès de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN
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