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LISBONNE – Dix ans après le printemps arabe, les pays de l’OTAN doivent avoir une approche unie et proactive à l’égard du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, afin d’y renforcer la sécurité et de soutenir les efforts déployés pour y consolider la démocratie, ont indiqué ce week-end les législateurs de l’ensemble de l’Alliance.
« Les défis émanant du Sud sont tout aussi redoutables que ceux provenant de l’Est, et pourtant les Alliés n’ont pas encore fait preuve du même niveau de concentration stratégique sur leur périphérie sud », souligne le projet de rapport rédigé pour l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AP-OTAN) par la députée française Sonia Krimi.
Deux projets de rapport examinant les effets des printemps arabes de 2011 et l’agenda sur la sécurité dans la région méditerranéenne ont été débattus lors de la session annuelle de l’Assemblée, qui se tient actuellement à Lisbonne.
Dans son projet de rapport, approuvé dimanche par la commission politique (PC) de l’AP-OTAN, Mme Krimi formule plusieurs propositions, qui devraient transparaître dans une stratégie d’engagement accru de l’OTAN aidant à stabiliser la situation sécuritaire dans la région.
Au nombre de ces propositions figurent : le renforcement des moyens OTAN de défense collective et de gestion des crises dans la région ; la mobilisation de ressources suffisantes pour financer les projets associant des partenaires méditerranéens ; la promotion de la dimension politique du Dialogue méditerranéen de l’OTAN ; l’intensification des contacts avec les organisations régionales ; et l’instauration d’une coordination plus étroite avec l’Union européenne concernant les questions régionales.
D’autres acteurs profitent du manque d’engagement des pays de l’OTAN dans la région, rappelle Sonia Krimi.
« La Russie a résolument saisi les occasions de combler le vide laissé par les nations occidentales, notamment en Libye et en Syrie, cherchant à étendre son influence, à renforcer son prestige et à tester ses capacités de projection de puissance », a-t-elle indiqué à la commission. « L’implication de la Chine est principalement économique, mais elle mène également des actions politiques et sécuritaires. »
Dans un rapport approuvé samedi par la commission sur la démocratie et la sécurité (CDS), la députée française Anissa Khedher a pour sa part insisté sur le fait que les relations de l’OTAN avec la région doivent se fonder sur le respect des principes démocratiques.
« Il est indispensable que les pays de l’OTAN placent le respect des valeurs démocratiques, des droits humains, de l’égalité des genres, et des libertés d’expression et de la presse, au cœur de leurs relations avec les autorités nationales de la région », lit-on dans le rapport. « Les sociétés civiles de la région ont besoin d’un soutien concret. »
La stabilité de cette région est essentielle pour la sécurité des pays de l’Alliance, a déclaré Mme Khedher.
« Or cette stabilité dépend fortement de l’assouvissement des attentes socio-économiques et démocratiques des populations par les autorités de la région », a indiqué à la CDS Anissa Khedher. « Les pays alliés doivent […] soutenir les pays qui le souhaitent dans leur transition démocratique et encourager les autres à suivre leur exemple. »
Stéphane Lacroix, professeur associé à SciencesPo (France), chercheur au Centre d’études et de recherches internationales (CERI) de SciencesPo, a mis en garde l’AP-OTAN contre les dangers que représente l’inaction.
« La démocratisation du monde arabe n’est plus une priorité pour les puissances occidentales », a-t-il relevé. « Si nous n’y disposons plus de forces démocratiques ni de société civile, les seuls à profiter du chaos seront les djihadistes [...] L’on risque de se retrouver alors dans une situation bien pire que celle qui prévalait avant. »
Une autre intervenante, Lucy Kurtzer-Ellenbogen, directrice du programme sur les conflits israélo-palestiniens auprès du United States Institute of Peace, a fait le point de la situation dans la région. Elle s’inquiète du durcissement des attitudes des deux côtés, notamment chez les jeunes Israéliens et les jeunes Palestiniens.
« Il n’y a pas d’état stable ni de "statu quoʺ dans ce conflit. Ce que l’on constate, c’est que les sociétés se radicalisent et qu’elles adoptent une ligne plus dure dans le conflit ainsi que l’une envers l’autre », a-t-elle indiqué à la PC.
Laisser le conflit « suppurer » ne fait qu’aggraver les menaces qui pèsent sur la sécurité régionale, a déclaré Lucy Kurtzer-Ellenbogen. Elle a affirmé la nécessité de renforcer l’engagement international afin de jeter des ponts entre les acteurs de la société civile des deux parties, et ce même quand les efforts déployés pour trouver des solutions politiques sont bloqués.
« L’objectif devrait être pour le moins de contrer l’engrenage des situations de crise. Les Israéliens et les Palestiniens allument peut-être leurs propres feux, mais ils devront un jour ou l’autre assurer leur avenir et ils ne pourront le faire qu’avec l’aide d’acteurs extérieurs », a-t-elle conclu.
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