Tbilissi, le 29 octobre 2018 – L’élection présidentielle du 28 octobre en Géorgie a été pluraliste et gérée de manière professionnelle. Les candidats ont pu faire campagne librement et les électeurs ont eu véritablement le choix malgré des cas de détournement de fonds publics et la participation à la campagne de hauts responsables de l’État du parti au pouvoir pas toujours conforme à la loi, ont conclu les observateurs internationaux dans une déclaration préliminaire publiée aujourd’hui. Un déséquilibre important des dons et des plafonds de dépenses excessivement élevés ont aussi contribué à des conditions inéquitables, selon la déclaration.
Si les radiodiffuseurs de service public ont fourni à tous les candidats un espace pour présenter leurs positions, la forte polarisation des médias privés et l’absence de reportages analytiques, ainsi que les campagnes négatives et la virulence du discours des participants, ont limité la capacité des électeurs à faire un choix en toute connaissance de cause, ont ajouté les observateurs. Les modifications légales qui ont renforcé la représentation du parti au pouvoir à tous les niveaux de l’administration électorale et la transparence insuffisante dans la sélection des membres sans affiliation partisane des commissions de niveau inférieur, ont pesé sur l’idée que le grand public s’est faite de leur impartialité.
« Lors de cette élection, la Géorgie a apporté la preuve de la maturité de sa démocratie, ce qui suscite encore plus d’attentes. Par conséquent, tout en saluant les réalisations, il importe d’être conscient des insuffisances liées au climat de la campagne, aux finances et à l’environnement juridique en général », a déclaré Kristian Vigenin, coordinateur spécial et chef de la mission d’observation de courte durée de l’OSCE. « Nous espérons que la population géorgienne participera activement au second tour et que le
résultat reflétera parfaitement sa volonté ».
Si, d’une manière générale, les libertés fondamentales ont été respectées et si les candidats ont pu faire campagne librement, plusieurs activités de campagne ont été perturbées et certains bureaux ou matériels de campagne des partis ont été vandalisés. La campagne a été dominée par des sujets polarisants, le dénigrement et de vives accusations entre le parti au pouvoir et l’un des partis d’opposition.
« Le scrutin d’hier a été bien organisé et les électeurs ont fait leur choix sans restriction », a indiqué Andrej Hunko, chef de la délégation de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. « Des sommes prodigieuses ont été dépensées pendant la campagne électorale, et ce dans un pays où le niveau de pauvreté est élevé. Le nombre important de candidats qui ont apparemment fait campagne pour le compte d’autres candidats, compromettant ainsi l’égalité des chances et entamant la confiance des
citoyens dans le processus électoral a été un autre sujet de préoccupation. »
Margareta Cederfelt, cheffe de la délégation de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE, a déclaré : « Avec le scrutin d’hier, la Géorgie a montré que des efforts sont faits pour améliorer le processus électoral. J’encourage toutes les parties prenantes aux élections, en particulier les médias et la société civile, à faire preuve du plus haut degré d’éthique professionnelle, en particulier pendant la campagne du second tour. Je tiens à féliciter la population géorgienne, les jeunes en particulier, qui ont une fois de plus apporté la preuve de leur profond attachement à la démocratie. »
La collecte de données personnelles d’électeurs par le parti au pouvoir a suscité des préoccupations et des pressions liées à cette pratique ont été observées le jour du scrutin. Le vote a fait l’objet d’une évaluation positive malgré quelques problèmes de procédure lors du dépouillement et le fait que de nombreux citoyens observateurs et représentants des médias aient agi au nom de partis politiques.
Les représentants des candidats et des organisations citoyennes et internationales ont été autorisés à observer l’ensemble du processus électoral et l’accréditation s’est faite sans discrimination et avec professionnalisme. Pendant la période préélectorale, de hauts responsables du parti au pouvoir et de hauts fonctionnaires ont violemment attaqué le travail et les représentants de groupes de citoyens observateurs. Cela étant, le travail d’observation de plus de 70 organisations de citoyens observateurs a contribué à la transparence du processus.
« Nous saluons le caractère pluraliste de l’élection et l’engagement résolu d’organisations indépendantes de la société civile, mais nous sommes préoccupés par le fait que certaines ont été la cible d’attaques verbales de la part de hauts responsables de l’État », a indiqué Laima Andrikienė, chef de la délégation du Parlement européen. « Nous regrettons aussi que l’occupation de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie par la Russie et la décision des autorités locales de fait de fermer la frontière administrative avec l’Ossétie du Sud à l’occasion des elections, ait privé de nombreux citoyens géorgiens de la possibilité de voter ».
Au total, 25 candidats, 16 issus de partis politiques et 9 indépendants, ont été enregistrés dans le cadre d’un processus transparent et inclusif. Les données sur les électeurs ont pu être achetées et l’authenticité des signatures de soutien n’a pas pu être vérifiée faute de mécanisme efficace. Il est devenu clair pendant la campagne qu’un nombre important de candidats s’étaient faits enregistrer de manière à pouvoir profiter des fonds publics et du temps d’antenne gratuit pour soutenir d’autres candidats, qui ont ainsi bénéficié d’un avantage déloyal.
« La Géorgie est un exemple positif de réforme et un élément moteur de l’intégration euro-atlantique. J’ai été hier impressionnée de voir de nombreux citoyens déterminés à exercer leur droit démocratique », a indiqué Rasa Juknevičienė, cheffe de la délégation de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN. « Cela étant, ces élections montrent que sans garanties solides, la concentration du pouvoir et des ressources peut être un risque pour la démocratie ».
Du côté positif, les deux radiodiffuseurs de service public ont décidé d’offrir à tous les candidats le même temps d’antenne gratuit et ont organisé de nombreux débats au cours desquels ceux-ci ont pu présenter leurs points de vue. L’autorité de régulation des médias n’a pas toujours été transparente et impartiale lorsqu’elle est intervenue dans la campagne. Les résultats de la surveillance des médias ont mis en évidence une nette partialité dans la couverture des médias privés.
« L’engagement visible des électeurs ne devrait pas être sapé par les membres de la classe politique qui font campagne. Malheureusement, nous avons été témoins d’affrontements violents, d’exagérations grossières, de campagnes de dénigrement et d’insultes personnelles », a déclaré l’ambassadeur Geert Hinrich Ahrens, chef de la mission d’observation électorale du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE.
« En cas de second tour, la mission d’observation électorale du BIDDH restera sur place pour l’observer ».
Le cadre juridique offre une bonne base pour la tenue d’élections démocratiques. Si la révision du Code électoral en 2017 et 2018 a apporté des améliorations techniques, certaines lacunes demeurent et les modifications récentes ont été une occasion manquée de tenir compte d’autres recommandations antérieures du BIDDH et du Conseil de l’Europe et de supprimer les lacunes et les incohérences, souligne la déclaration.
La législation sur le financement des partis et des campagnes électorales n’est pas uniforme et les récentes modifications législatives n’ont pas tenu compte des recommandations de longue date du BIDDH et du GRECO du Conseil de l’Europe. L’absence de réglementation sur l’obtention de prêts pour financer les dépenses de campagne et l’établissement de rapports sur l’utilisation de ces fonds contribue potentiellement à une inégalité des chances. Bien que la Cour des comptes ait vérifié et publié
rapidement les rapports avant l’élection, l’absence de délais précis pour traiter des violations et de l’insuffisance des ressources de l’institution ont soulevé des inquiétudes quant à l’efficacité du contrôle du financement des campagnes électorales.
Pour de plus amples informations :
Henrik Bliddal, AP-OTAN, +32 475 752 725, [email protected]
Iryna Sabashuk, AP OSCE, +995 591 716 350 ou +45 60 10 81 73, [email protected]
Thomas Rymer, BIDDH, +995 591 616 398 ou +48 609 522 266, [email protected]
Bogdan Torcatoriu, APCE, +995 591 716 338 ou +33 6 50 39 29 40, [email protected]
Karl Minaire, PE, +995 599 070 453 ou +32 228 321 88, [email protected]