Les élections en Bosnie-Herzégovine ont été concurrentielles, mais l’échec des réformes et la rhétorique clivante suscitent des inquiétudes, selon les observateurs internationaux

03 octobre 2022

Crédit Photos OSCE PA


Les élections générales en Bosnie-Herzégovine ont été concurrentielles et dans l’ensemble bien organisées, dans le respect des libertés fondamentales pendant la campagne. Cependant, l’environnement électoral est resté marqué par l’échec des réformes, un manque de confiance généralisé dans les institutions publiques et un discours de division ethnique, comme l’ont affirmé les observateurs internationaux dans une déclaration publiée ce jour.

La mission d’observation conjointe du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) de l’OSCE, de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE (AP OSCE), de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AP-OTAN), et du Parlement européen (PE) a constaté que le cadre juridique constituait une base solide pour la tenue d’élections démocratiques.

Les élections ont eu lieu dans un contexte d’impasse politique et de désillusion généralisée à l’égard de la classe politique, certaines institutions majeures étant bloquées. Les principaux partis au pouvoir ont régulièrement eu recours à des discours de division ethnique dans leurs débats. Bien que la campagne se soit déroulée de manière pacifique, les observateurs ont noté certaines pressions exercées sur des employés du secteur public. Malgré quelques incidents perturbateurs à l’intérieur et autour des bureaux de vote, le scrutin s’est tenu globalement dans le calme. Si les procédures de vote ont été généralement suivies, le secret du vote a souvent été menacé. Des personnes non autorisées ont également suivi des électeurs ou aidé plusieurs électeurs. Les observateurs ont évalué négativement les procédures de dépouillement dans de nombreux endroits, principalement en raison d’irrégularités procédurales.

« Les efforts considérables qui ont été déployés pour le bon déroulement de ce processus électoral doivent s’accompagner d’efforts similaires visant à sortir de l’impasse politique qui continue de faire obstacle au véritable développement démocratique du pays », a déclaré Pascal Allizard, coordinateur spécial et chef de la mission d’observation à court terme de l’OSCE. « La désillusion globale à l’égard de la classe politique est manifeste, mais j’ai pu constater que certains candidats tournés vers l’avenir s’efforçaient d’induire un changement politique et socio-économique dans le pays, une tendance
positive que j’encourage les nouveaux élus à développer ».
 
Les restrictions au droit de se porter candidat fondées sur l’appartenance ethnique et le lieu de résidence sont contraires au principe du suffrage universel et égal et aux normes internationales en matière d’élections démocratiques. Les arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l’homme et la Cour constitutionnelle de l’État contre la nature discriminatoire de ces limitations n’ont toujours pas été appliqués.

« Maintenant que les citoyens de Bosnie-Herzégovine ont voté, les responsables et les partis politiques doivent y voir un mandat pour travailler à l’avenir de leur pays et à la perspective de l’intégration européenne », a déclaré Stefan Schennach, chef de la délégation de l’APCE. « Il est particulièrement important de donner à la jeune génération d’électeurs le sentiment que l’avenir se trouve dans leur propre pays. Pour ce faire, il est indispensable de combler le fossé entre les différents groupes ethniques. Il devrait suffire que chaque citoyen de Bosnie-Herzégovine s’identifie comme tel sans qu’aucune autre précision ne soit nécessaire ».

Plusieurs défaillances nuisent à l’efficacité du cadre juridique, tandis que l’échec des négociations entre les partis politiques n’a pas permis de faire les réformes nécessaires. Néanmoins, les dernières modifications apportées à la législation le 27 juillet ont ajouté des garanties importantes. Le fait, toutefois, que ces modifications aient été apportées si peu de temps avant les élections n’a pas permis de bien mettre en place tous les mécanismes de mise en œuvre. D’autres changements annoncés le jour du scrutin n’étaient pas prévisibles au moment du vote, laissant à la fois les électeurs et les candidats dans l’incertitude quant aux répercussions finales du vote de l’assemblée cantonale.

« La capacité de gérer un processus électoral semble plutôt bien établie ici en Bosnie-Herzégovine », a déclaré Irene Charalambides, chef de la délégation de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE.
« Mais la confiance réelle dans les processus démocratiques restera probablement faible tant que les structures de l’État ne répondront pas à la volonté de la population plutôt qu’aux intérêts bien ancrés des partis politiques ».

À quelques exceptions notables près, les femmes n’ont pas joué un rôle majeur dans la campagne, et les candidates ont souvent été la cible d’insultes et de moqueries sur les réseaux sociaux. Les stéréotypes de genre de longue date demeurent et les efforts déployés pour accroître la participation active des femmes aux élections ont été insuffisants.

« Hier, nous avons observé une élection globalement bien organisée et concurrentielle, malgré les visions très différentes de l’avenir de la Bosnie-Herzégovine. Dans les bureaux de vote, nous avons rencontré des équipes d’assesseurs composées de nombreux jeunes et de nombreuses femmes, déterminés à garantir le bon déroulement de ces élections. Et nous avons vu les citoyens faire leur choix démocratique », a déclaré Mimi Kodheli, chef de la délégation de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN. Et d'ajouter : Aujourd’hui, les citoyens de ce pays attendent à juste titre que les élus assument la responsabilité et la volonté de construire l’avenir de leur pays dans l’intérêt de tous les citoyens – pour un pays sûr et stable, pour la réconciliation, pour le développement économique et social et pour le progrès démocratique 

L’administration électorale de haut niveau a bénéficié de la confiance des parties prenantes, et géré les élections de manière efficace et transparente. Cependant, la confiance dans les commissions des bureaux de vote était faible en raison de nombreuses plaintes selon lesquelles certains partis politiques auraient échangé des postes pour obtenir la mainmise sur tel ou tel bureau de vote le jour du scrutin.

« Ces élections ont eu lieu dans des circonstances nationales et internationales difficiles », a déclaré Andreas Schieder, chef de la délégation du Parlement européen. « Nous regrettons que des changements de dernière minute aient été imposés par le Haut Représentant. À présent, après l’élection, le Parlement européen appelle à former un gouvernement sans heurts et à mettre en œuvre rapidement toutes les réformes promises, y compris les réformes électorales, conformément aux décisions des tribunaux locaux et internationaux. Il n’y a pas de temps à perdre ».

L’absence de débat public et l’utilisation de discours de division, qui s’est également traduite par une couverture médiatique limitée et partiale, ont réduit la possibilité pour les électeurs de faire un choix éclairé le jour du scrutin. Les récentes actions en diffamation intentées contre des journalistes, les cyberattaques visant des médias importants, ainsi que l’intimidation et le harcèlement des journalistes ont créé un environnement de travail marqué par des pressions voire des persécutions politiques.

« Le suivi des médias par la mission a permis de conclure que la couverture de la campagne par la plupart des médias était considérablement limitée », a déclaré l’ambassadeur Peter Tejler, chef de la mission d’observation des élections du BIDDH. « Elle reflétait également une fragmentation selon des clivages ethniques et un sectarisme politique. Par conséquent, les électeurs n’ont pas pu s’appuyer sur des informations complètes et impartiales afin de décider pour qui voter. Les élections ne sont pas un événement d’un jour. Dans les prochains jours, nous continuerons à observer les évolutions post- électorales afin de pouvoir évaluer l’ensemble du cycle électoral ».

La mission d’observation internationale des élections générales en Bosnie-Herzégovine a réuni au total 471 observateurs : 336 experts et observateurs à court terme et à long terme déployés par le BIDDH, 83 parlementaires et personnels de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE, 23 de l’APCE, 17 de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN et 12 du Parlement européen.

 

Pour de plus amples informations, veuillez contacter :
Katya Andrusz, BIDDH : +48 609 522 266 or [email protected]
Anna Di Domenico, AP OSCE : +45 60 10 83 80 or [email protected]
Cristina Castagnoli, PE : +32 470 880872 or [email protected] Bogdan Torcătoriu, APCE : +387 62522009 or [email protected]
Henrik Bliddal, AP-OTAN : +32 474 844015 or [email protected]
 

 

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