Les Alliés doivent accélérer la livraison des armes et des munitions afin que l’Ukraine puisse se défendre contre les forces d’invasion russes. De même, ils doivent augmenter leurs dépenses de défense pour reconstituer leurs stocks et renforcer les défenses de la zone euro-atlantique, ont prévenu, ce dimanche, les législateurs de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AP-OTAN).
Ceux-ci ont également souligné que les dirigeants russes et leurs troupes, de même que leurs complices au Bélarus, doivent être tenus responsables des atrocités commises au cours de la guerre. Lors des discussions organisées dans le cadre de la session de printemps de l’AP-OTAN à Luxembourg, il a été préconisé d’établir un tribunal international pour juger les auteurs des crimes de guerre.
« La vitesse importe, elle est même d’une importance considérable, et si nous acheminons de nouvelles capacités dans des délais trop lents, certaines d’entre elles arriveront trop tard en Ukraine pour être encore utiles », a déclaré aux membres de la commission politique (PC) le législateur slovaque Tomas Valasek, au moment où l’OTAN prépare son sommet de Vilnius des 11 et 12 juillet qui sera consacré pour l’essentiel à la guerre.
Un avant-projet de rapport préparé par M. Valasek portant sur les répercussions de l’offensive russe eu égard à l’ordre mondial et sur les enseignements à tirer de la guerre (« La guerre de la Russie contre l’Ukraine : revisiter l’ordre mondial et tirer les enseignements pour l’OTAN »), souligne qu’il importe d’accélérer l’adaptation de l’Organisation pour veiller à ce qu’elle soit à la hauteur de la tâche qui l’attend : parer à l’assaut des forces autoritaires actuellement incarnées par la Russie et protéger l’ordre international, fondé sur des règles.
L’avant-projet de rapport souligne également qu’il est important d’allouer au minimum 2 % du PIB aux budgets militaires et précise que cela devrait constituer une nouvelle norme, la guerre ayant notamment mis en évidence les insuffisances de l’industrie de défense. Lors de leur réunion à Vilnius, les dirigeants de l’OTAN devraient revoir les objectifs en matière de dépenses de défense des 31 pays membres de l’Alliance.
« La guerre a révélé au grand jour les conséquences de ce manque d’investissements », a déclaré M. Valasek, avant d’insister sur le fait que ces « 2 % du PIB doivent devenir la nouvelle référence si nous voulons vraiment mettre à exécution les décisions que nous avons prises en vue de défendre les flancs sud et est de notre espace ».
Dans le discours qu’elle a prononcé devant la commission politique, Sviatlana Tsikhanouskaya, cheffe des forces démocratiques d’opposition du Bélarus, a fait valoir que le soutien à la société civile de son pays permettrait de hâter la victoire de l’Ukraine. Elle a décrit comment le président Loukachenko s’est fait « le complice de toutes les entreprises criminelles et meurtrières » de Vladimir Poutine.
« Il a mis à la disposition de la Russie terrains d’aviation, bases militaires, terrains d’entraînement, hôpitaux et autres infrastructures. Il a fourni à la Russie du carburant, des munitions, des blindés et des véhicules », a indiqué Mme Tsikhanouskaya, avant de signaler qu’après le mandat d’arrêt international émis à l’encontre de Vladimir Poutine, « un mandat d’arrêt analogue devrait être émis à l’encontre d’Alexandre Loukachenko pour crime d’agression et crime contre l’humanité ».
La nécessité de rendre justice a constitué le thème central de la réflexion de la sous-commission sur la résilience et la sécurité civile (CDSRCS). Les législateurs ont estimé que les dirigeants russes qui ont orchestré l’invasion de l’Ukraine doivent en être tenus responsables, de même que ceux au Bélarus qui, à l’instar d’Alexandre Loukachenko, ont aidé et soutenu Moscou.
Un avant-projet de rapport (« Lutter contre l’impunité des violations du droit international dans le cadre de la nouvelle invasion russe de l’Ukraine ») précise ainsi que les troupes russes ont bafoué le droit international humanitaire, qu’elles ont commis des crimes de guerre en Ukraine en attaquant civils et infrastructures civiles et qu’elles pourraient également y avoir commis crimes contre l’humanité et génocide. Lutter contre l’impunité doit donc constituer une priorité essentielle.
« Tous ces efforts doivent être maintenus et renforcés », a déclaré le législateur belge Rodrigue Demeuse, auteur de cet avant-projet de rapport. « Il est notamment nécessaire d’allouer de plus amples moyens aux institutions judiciaires nationales et internationales chargées de collecter les preuves des violations graves qui ont été commises et d’en poursuivre les auteurs ».
« Les pays alliés doivent également continuer à appeler, comme notre Assemblée l’a fait à plusieurs reprises, à la création d’un tribunal international pour poursuivre les dirigeants russes coupables du crime d’agression contre l’Ukraine, ainsi que leurs complices bélarusses », a-t-il indiqué. L’avant-projet de rapport fait notamment valoir que dans le combat pour la justice qui est actuellement mené en Ukraine, c’est le respect du droit international, fondement même des systèmes démocratiques et de l’ordre mondial libéral, qui est en jeu.
Assise aux côtés de Rodrigue Demeuse, Oleksandra Matviichuk, directrice du Centre ukrainien pour les libertés civiles (colauréat du prix Nobel de la paix 2022), a fait savoir que son organisation et l’initiative « Un tribunal pour Poutine » avaient apporté la preuve que 39 000 crimes de guerre avaient été commis au cours de l’année écoulée.
« La Russie utilise les crimes de guerre comme méthode de guerre. Elle tente de briser la résistance de la population et d’occuper le pays en infligeant d’immenses souffrances aux civils », a-t-elle indiqué dans le cadre d’un exposé percutant. Oleksandra Matviichuk a ainsi exhorté les parlementaires à « fournir [rapidement] à l’Ukraine des armes modernes car la loi, pour le moment, n’obtient aucun résultat ».
Appelant l’attention sur le sort des enfants en Ukraine, Irene Fellin, représentante spécial du secrétaire général de l’OTAN pour les femmes, la paix et la sécurité, a rappelé que « le nombre d’enfants tués ou mutilés, torturés, arrachés de leur foyer, déportés de leur région d’origine, privés de soins de santé et d’éducation, ce nombre est stupéfiant - et il continue d’augmenter ».
Elle a signalé qu’au moins un enfant par jour avait été tué depuis le lancement de l’invasion en février 2022. Au 2 avril 2023, au moins 511 enfants avaient trouvé la mort et plus de 1 000 autres avaient été blessés. Les armes explosives utilisées dans les zones habitées sont la principale cause de ces décès ou blessures.
Le ministère ukrainien de l’Éducation fait savoir que 3 198 établissements d’enseignement ont subi les feux de l’artillerie ou ont été bombardés. Il ressort également des chiffres officiels que plus de 16 000 enfants ont été déportés vers la Russie. « Fort heureusement », a déclaré Mme Fellin, « pour l’heure, nous n’avons pas reçu d’informations vérifiées concernant d’éventuels enrôlements d’enfants dans cette guerre ».