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Le 16 septembre, dans le cadre de sa deuxième réunion sur plateforme numérique, la commission de l’économie et de la sécurité de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN a entamé la première lecture des projets de rapports de ses deux sous-commissions – qui traitent tous deux des dimensions économiques de l’instabilité autour de deux voies navigables cruciales. Au total, 24 parlementaires ont assisté à cette réunion, menée par le président de la commission Ivans Klementjevs (Lituanie). Les discussions ont porté sur les deux projets de rapports suivants : La crise du Golfe et les marchés mondiaux de l’énergie, de Jean-Marie Bockel (France) et La région de la mer Noire : tensions économiques et géopolitiques d’Ausrine Armonaite (Lituanie).
Jean-Marie Bockel, rapporteur de la sous-commission sur les relations économiques transatlantiques, a déclaré aux parlementaires de l’OTAN que les États arabes du Golfe avaient longtemps joué un rôle pivot dans le système énergétique mondial mais que la région se trouve de plus en plus marquée par l’incertitude stratégique à mesure que diverses crises s’y superposent :
• les guerres civiles en Iraq, au Yémen et en Syrie ;
• les tensions relatives au programme d’armement nucléaire iranien ;
• les incursions agressives de l’Iran en Syrie, en Iraq, au Liban et au Yémen ;
• l’intervention saoudo-émirienne dans la guerre civile au Yémen ; et
• les dissensions entre le Qatar et les autres États arabes du Golfe.
Selon Jean-Marie Bockel, les vulnérabilités physiques du secteur énergétique du Golfe sont apparues clairement en septembre 2019, lorsque les rebelles houthis soutenus par l’Iran ont attaqué les vastes installations pétrolières saoudiennes d’Abqaiq et le champ pétrolifère de Khurais. Cette crise a également montré à quel point les acteurs locaux continuent de dépendre des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni pour renforcer la stabilité régionale. Ce projet de rapport analyse également les initiatives de coopération et de renforcement du dialogue en matière de sécurité à travers l’lnitiative de coopération d’Istanbul (ICI).
La Covid-19 a également éprouvé les relations entre les pays du Golfe, ainsi que sur les marchés du pétrole. Le sénateur Bockel a indiqué que les budgets nationaux avaient été grevés par la chute de la demande énergétique liée aux confinements économiques et par la guerre des prix qui a fait rage entre Russes et Saoudiens. En outre, les marchés du travail dans les pays du Golfe souffrent de la pandémie et les efforts des gouvernements pour diversifier des économies encore dépendantes du pétrole et du gaz pourraient dès lors être compromis.
La chute des prix du pétrole a eu des effets dévastateurs sur l’industrie du pétrole de schiste, jusque-là en plein essor. Les bas prix actuels ne permettent plus tellement aux États-Unis de jouer leur rôle de producteur influent – une position qui leur avait auparavant permis de limiter l’influence de l’OPEC et de la Russie. L’effondrement des prix du pétrole en mars pourrait renverser une tendance récente et stratégiquement importante à baisse des importations de pétrole par les États Unis.
Le rapporteur a conclu en suggérant que l’Europe et les États-Unis devraient travailler de concert pour diminuer les tensions dans le Golfe, y compris en favorisant la réconciliation entre les membres du CCEAG (Conseil de coopération des États arabes du Golfe) et en veillant à ce que les rivalités entre l’Iran et les membres du CCEAG ne déclenchent pas de conflits encore plus violents. La stabilité dans la région exigera également une réforme des économies nationales, davantage de tolérance et une répartition plus équitable des richesses.
Lors de la présentation de son projet de rapport au nom de la sous-commission sur la transition et le développement, Mme Armonaite a indiqué que, tout comme dans le Golfe, la région de la mer Noire était également confrontée à de graves incertitudes sur le plan stratégique. Selon elle, l’agression russe a compliqué la transition économique au sein de pays qui s’efforçaient de se faire une place dans l’ordre économique mondial et européen. Par ailleurs, la région de la mer Noire n’a pas pu bénéficier du décollage économique qui aurait pu être le sien si l’on avait pu donner des bases pacifiques aux relations entre États.
Le principal litige en cours oppose la Russie et l’Ukraine, mais les autres tensions bilatérales et régionales sont nombreuses, et comprennent notamment l’occupation par la Russie des régions géorgiennes de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie. Elle affirme que, du point de vue de la Russie, des pays frontaliers paralysés par des tensions, des guerres civiles ou des conflits latents valent toujours mieux que des États autonomes, prospères et confiants, entretenant des relations de bon voisinage.
Elle souligne qu’au-delà de l’agression russe, l’intégration régionale est rendue plus complexe par les différences relatives aux :
• niveau de développement économique et de la société civile ;
• ressources naturelles ;
• caractéristiques institutionnelles ;
• expériences nationales durant la guerre froide et au cours des premières années de la transition ; et à
• l’orientation politique.
La Covid-19 sera une crise déterminante pour la région de la mer Noire et l’épidémie n’a fait qu’accentuer les crises politiques et militaires régionales. Dans l’est de l’Ukraine déchiré par la guerre, pas moins d’1 million de personnes sont désormais bloquées et ne peuvent plus traverser les lignes de contact autorisées pour percevoir leurs pensions et allocations sociales, rendre visite à leur famille ou même travailler.
La rapporteure a décrit de quelle façon les différents pays de la région faisaient face à ces très graves difficultés et a souligné les répercussions pour ceux qui vivent dans des régions ravagées par l’agression russe. Elle a indiqué que la résilience face à la maladie variait considérablement d’une région à l’autre.
Ausrine Armonaite a conclu en appelant les États membres de l’OTAN à insister sur le respect du droit international dans la région de la mer Noire, notamment les principes d’indépendance, de souveraineté et d’intégrité territoriale, et à veiller au respect de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer. Elle a déclaré que les États membres de l’OTAN et leurs parlements devaient maintenir leurs régimes de sanctions à l’encontre de la Russie et a soutenu qu’en aucun cas, les graves violations du droit international par la Russie ne devraient être banalisées.
Ces deux projets de rapports seront révisés et présentés en deuxième et dernière lecture lors de la session annuelle de l’AP-OTAN cet automne.
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