2021 - RAPPORT - DÉPENSES DE DÉFENSE DES PAYS ALLIÉS : MENACES PERSISTANTES ET NOUVELLES CONTRAINTES  

Christian TYBRING-GJEDDE (Norvège)

21 octobre 2021

Ce rapport a été adopté par la commission de l'économie et de la sécurité à la session annuelle de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN à Lisbonne.

 

La pandémie de Covid-19 et la récession mondiale qui en a suivi pèsent lourdement sur les budgets de la défense des pays alliés. Alors que les gouvernements adoptent des plans de relance budgétaire pour soutenir la demande globale, les analystes stratégiques craignent de plus en plus que les dépenses de défense soient sacrifiées au profit d'autres priorités criantes. Le paysage sécuritaire reste alarmant, tandis que la pandémie et la crise économique qui l'accompagne ne font qu'aggraver les nombreux défis liés à la défense. Et c’est bien là que se situe le nœud du problème. Les Alliés sont confrontés à une longue liste de défis, à la fois traditionnels et nouveaux. Pour les relever, ils doivent mobiliser à la fois ressources financières et efforts adéquats pour optimiser leur efficacité. 

Même avant la pandémie, les gouvernements alliés avaient identifié un besoin commun de veiller à ce que les dépenses et les investissements militaires se maintiennent à un niveau suffisant pour répondre aux exigences de sécurité actuelles et futures. Le défi est devenu évident au lendemain de l'annexion illégale de la péninsule de Crimée par la Russie et de l’agression de cette dernière en Ukraine orientale. Au sommet du pays de Galles de 2014, les dirigeants des pays alliés se sont engagés à consacrer 2 % de leur production économique nationale aux dépenses de défense et 20 % de leurs budgets de la défense respectifs aux équipements lourds, à la recherche et au développement (R&D). Depuis 2014, plusieurs Alliés - en particulier ceux qui sont les plus proches du flanc oriental de l'OTAN - ont fait d'importants progrès dans la réalisation de ces engagements, atteignant ou dépassant leurs obligations ces trois dernières années. Mais d'autres semblent moins pressés et plusieurs pays alliés seront loin d’atteindre les objectifs d'ici à 2024.

La question des dépenses de défense aboutit invariablement à une discussion plus large et infinie sur le partage des charges. D’aucuns redoutent que la solidarité de l'Alliance qui a fait le succès de l'OTAN ne soit compromise si l'on a le sentiment que certains pays alliés ne respectent pas leurs engagements en matière de dépenses minimales. L'OTAN elle-même cherche à encourager les Alliés à respecter leurs engagements en matière de dépenses, mais elle s’efforce aussi d'optimiser l'efficacité des dépenses de défense afin que celles-ci produisent le meilleur rendement possible en termes de capacités. L'Union européenne poursuit en grande partie ces mêmes objectifs, même si la crise économique entraîne certaines réductions dans ses programmes industriels de défense.

Pour toutes les raisons citées ci-dessus, l'Engagement en matière d'investissement pour la défense, réaffirmé tout récemment au sommet de l’OTAN de juin 2021, devrait continuer de représenter un jalon pour les gouvernements alliés, dans la mesure où il reflète les types d'investissements que les Alliés doivent continuer à réaliser pour assurer leur défense nationale et la défense collective. Mais le plus important en définitive, ce sont les capacités, qui doivent elles aussi continuer à faire l'objet d'efforts collectifs et nationaux. Les gouvernements des pays alliés devraient profiter de la réflexion actuellement menée par l'OTAN pour galvaniser la volonté politique de respecter ces engagements essentiels en matière de sécurité et approfondir la coopération de manière à maximiser les ressources parcimonieusement affectées à la défense. Tous les efforts, qu’il s’agisse d’améliorer l’efficacité des rapports entre forces opérationnelles et administration, de rationaliser les budgets de la défense, de réévaluer les procédures bureaucratiques des ministères de la défense, y compris par le biais de projets en collaboration, mais aussi les efforts placés sur la planification de forces conjointes et l'intégration des industries de la défense, entre autres, doivent faire partie de l’équation. Mais ce sont le développement des capacités et les investissements de long terme qui doivent rester au cœur de ces efforts, car ils sont essentiels à une époque d'incertitudes géopolitiques croissantes. Le maintien des budgets d'acquisition et d'investissement dans le domaine de la défense sera au bout du compte crucial pour aider les principaux acteurs de l'industrie de la défense à surmonter la récession actuelle. Cela nécessitera probablement une phase de consolidation de ces industries de la défense déjà fortement éprouvées. Mais cela devrait finir par alléger les pressions exercées sur des budgets gouvernementaux déjà très serrés en comprimant les coûts, tout en renforçant l'interopérabilité et l'intégration globale de la défense au sein de l'Alliance. Cette démarche devrait être effectuée à la fois au niveau européen, où une consolidation est clairement nécessaire, mais aussi au niveau transatlantique puisque des marchés de la défense plus ouverts pourraient soutenir ces efforts.
 
 


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