Sécurité de la mer Baltique et de la mer Noire : un impératif pour l’OTAN dans le contexte de la guerre menée par la Russie

21 mai 2023

Ce samedi, les membres de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN ont instamment conseillé à l’Alliance atlantique de poursuivre la consolidation de son dispositif de défense dans les régions de la mer Baltique et de la mer Noire en travaillant main dans la main avec ses partenaires et les pays qui souhaitent y adhérer, tandis qu’elle s’adapte à la situation prévalant désormais en matière de sécurité à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Au fil d’une série de débats organisés à Luxembourg dans la perspective du sommet que l’OTAN tiendra à Vilnius les 11 et 12 juillet, les commissions de l’Assemblée se sont également penchées sur la question de la sécurité et de la dépendance énergétiques, tout comme sur la nécessité de dynamiser les relations économiques transatlantiques et de protéger l’ordre commercial fondé sur des règles.  

La sous-commission sur la coopération transatlantique en matière de défense et de sécurité de la commission de la défense et de la sécurité s’est intéressée à l’évolution accélérée des problèmes de sécurité dans la région de la Baltique ainsi qu’à la manière dont la Finlande, nouvelle venue dans l’OTAN, et la Suède, dont le processus d’accession suit son cours, pourront consolider les défenses alliées dans le Grand Nord. 

Un avant-projet de rapport de Jeroen van Wijngaarden (Pays-Bas) souligne le caractère vital d’une stratégie solide et unitaire pour l’adaptation de la région maritime septentrionale à la mutation de l’environnement sécuritaire. L’arrivée de la Finlande renforcera considérablement les capacités de l’OTAN dans la région de la Baltique, mais ce pays devra collaborer étroitement avec ses nouveaux alliés à mesure qu’il définira son rôle à l’intérieur de l’Organisation. 

Il se peut que l’ajustement de la stratégie de l’OTAN exige l’équipement de centres logistiques et de liaisons de commandement et de contrôle déjà en activité, de même qu’une étude sur la façon précise dont l’Alliance pourrait vouloir adapter sa présence en avant dans la région de la Baltique. Selon l’auteur du texte, une solution consisterait à cantonner en Finlande une nouvelle unité d’intégration des forces OTAN (NFIU), cantonnement combiné à un réaménagement des bases existantes dans la perspective d’un afflux soudain de forces alliées, au cas où lesdites bases serviraient à faciliter le déploiement rapide de troupes sur le flanc Est et à contribuer à l’exécution de plans de défense, d’activités de formation et d’exercices à l’échelon régional. 

Toujours selon l’auteur de cet avant-projet de rapport, les pays alliés devraient avoir pour priorité absolue de parachever le processus d’accession de la Suède ; cela suppose de coopérer avec les autorités suédoises pour dissiper les dernières – et légitimes – préoccupations d’ordre sécuritaire de la Türkiye et de trouver le moyen d’intégrer plus profondément encore le voisin nordique de la Finlande dans l’Alliance à mesure qu’il se rapproche de l’accession. 

Le dispositif de défense de l’OTAN dans la mer Noire a fait l’objet d’un avant-projet de rapport de la sous-commission sur l’avenir de la sécurité et des capacités de défense dans lequel Lord Lancaster (Royaume-Uni) met en évidence le besoin d’une stratégie régionale spécifique conjuguée à un plan de défense régional à toute épreuve. 

Une telle stratégie devrait prévoir la fourniture d’une assistance significative aux partenaires les plus vulnérables de l’OTAN – dont l’Ukraine, la Géorgie et la Moldova – et garantir une présence alliée 365 jours par an, l’objectif étant de décourager toute velléité d’agression russe et d’accomplir sur bref préavis des missions militaires dans la région. 

Observant que la menace russe qui pèse sur la sécurité de l’Alliance est « grave et de grande ampleur », le rapporteur insiste sur la nécessité de disposer dans la région de moyens militaires alliés – y compris des systèmes intégrés modernes de défense aérienne et de défense antimissiles – et d’y assurer une présence aérienne, navale et terrestre plus marquée. 

Pour sa part, la commission de l’économie et de la sécurité a pressé les pays alliés de réduire leur dépendance énergétique vis-à-vis de Moscou au moment où l’Europe met un terme à ses importations de gaz naturel russe. Dans un avant-projet de rapport, Harriett Baldwin (Royaume-Uni) signale que, grâce à ses réserves énergétiques, la Russie continue à engranger des recettes, de sorte qu’elle reste en mesure de menacer l’ordre sécuritaire européen. 

Le même document rappelle combien il est important de s’adapter à la nouvelle situation énergétique par une baisse de la consommation : outre qu’elle est bénéfique pour l’environnement, une telle démarche permet d’atténuer les pressions géopolitiques de la part de pays fournisseurs dirigés par un régime autoritaire. 

Enfin, est-il indiqué dans cet avant-projet, l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la volonté de cette dernière d’user de sa puissance énergétique comme d’un moyen d’intimidation montrent que, loin de relever du seul secteur civil, la sécurité énergétique, précisément, recèle de multiples implications militaires. 

Les risques d’insécurité engendrés par une prise de distance vis-à-vis de la mondialisation et de l’ordre international fondé sur des règles figuraient en bonne place dans l’ordre du jour de la sous-commission sur les relations économiques transatlantiques. Dans son avant-projet de rapport sur la question, Faik Öztrak (Türkiye) souligne que le maintien du système doit être une priorité pour l’OTAN et les gouvernements des pays alliés. 

L’auteur de ce document fait valoir que les échanges commerciaux avec les pays en voie de développement sont tout aussi indispensables pour des raisons de sécurité, dès lors qu’ils « représentent pour ces pays la source de revenus la plus efficace pour réduire leur pauvreté, accroître leur développement et maintenir leur stabilité ». 

Il préconise à cet effet « un leadership politique et économique stable, ainsi qu’une participation active du secteur privé et de la société civile » et « un sens politique créatif qui trouvera les moyens de resserrer les liens que certains acteurs mal intentionnés semblent actuellement déterminés à défaire ». 

En quête de moyens propices à la conception de nouvelles capacités militaires, les membres de la commission des sciences et des technologies ont débattu de la nécessité pour l’OTAN d’investir dans la recherche sur les matériaux innovants et la fabrication additive, moteurs indispensables de l’innovation dans le domaine de la défense. 

Sven Clement (Luxembourg) affirme dans son avant-projet de rapport que les matériaux innovants et la fabrication additive revêtent une importance stratégique et que l’Organisation pour la science et la technologie (OST) de l’OTAN devrait jouer un rôle de premier plan dans la coordination des travaux de recherche des pays alliés dans ces deux secteurs, de manière à éviter les répétitions inutiles d’efforts. 

Par ailleurs, un avant-projet de rapport de Joe Weingarten (Allemagne) exhorte les Alliés à intensifier la recherche spécialisée dans la robotique et les systèmes autonomes et à collaborer entre eux ou avec des partenaires animés de motivations semblables aux leurs – tels les États membres de l’Union européenne – à l’élaboration de normes et d’accords internationaux afin de réduire les risques de prolifération à des fins détournées ou d’utilisation par des acteurs non étatiques hostiles. 

Le rapporteur insiste sur le fait que l’élaboration d’interfaces humain-machine est essentielle à l’intégration des systèmes autonomes dans les forces armées de l’OTAN et il encourage les pays alliés à allouer des ressources supplémentaires à l’OST pour aider celle-ci à amplifier ses activités dans ce domaine et, singulièrement, dans la confiance entre humains et machines. 

Pour limiter le coût de leurs forces, peut-on encore lire dans l’avant-projet, les Alliés devraient compléter leurs systèmes d’armes complexes et technologiquement très perfectionnés par des systèmes autonomes moins chers pouvant être produits rapidement et en masse, en particulier durant les combats.